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Cela était très bon


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Pour faire suite à la réflexion de Pascal sur la notion de la proclamation d’une création bonne en Gn 1. Voici un prolongement possible offert par la théologie contemporaine.

Si par sa mort et sa résurrection, Jésus-Christ a offert à la création la promesse et la garantie de sa rédemption future, il ne serait pas inconsidéré de penser que le Christ rédempteur a toujours été, non seulement, au cœur même de la création, mais aussi dès son origine, en tant que fondement et possibilité de son salut. Dans cette perspective, création et rédemption doivent être articulées ensemble parce que participant du même mystère du Christ cosmico-rédempteur.

            En effet,

face à un monde chaotique , il est urgent d’annoncer la venue du Christ cosmique[1]

écrit K. Winiewski. En lui, la création traversée par la souffrance et la mort a désormais la possibilité d’une rédemption future. C’est peut-être aussi dans ce sens qu’il faudrait interpréter les paroles de l’auteur du livre de la Genèse, lorsqu’il affirme :

Dieu vit tout ce qu’il avait fait: cela était très bon[2].

Il ne nous semble pas que l’appréciation divine soit de type moral, mais plutôt à caractère christologico-cosmologico-eschatologique. Dieu vit que la création était bonne, pas parce qu’elle était parfaite au commencement, mais plutôt parce qu’elle avait déjà au commencement, en Christ, la garantie de sa rédemption future. Saint Paul a, lui aussi, partagé cette intuition dans sa Lettre aux Colossiens, lorsqu’il écrit :

tout a été créé par lui et en vue de lui. Il est avant toutes choses, et toutes choses subsistent en lui[3].

Jürgen Moltmann commente :

Si le fondement du salut pour toute la création, pour les hommes pécheurs et pour la « nature asservie », est le Christ, alors le Christ sera aussi le fondement de l’existence de toute la création, de l’homme et de la nature[4].

Christ est le fondement de la réalité, mais aussi le rédempteur de tout le processus évolutif, de la creatio originalis à la creatio continua, jusqu’à la rédemption définitive dans la creatio nova. L’intuition géniale de Moltmann est de dire que le rôle du Christ a une portée universelle et ne saurait être confiné à sa manifestation historique dans les limites d’un espace et d’une communauté humaine. Jésus-Christ, dans sa mort et dans sa résurrection est le Christ cosmique, fondement de la création toute entière, force motrice de l’évolution, rédempteur et sauveur du monde. Il n’est donc pas cosmique en tant que qualifié strictement par les ordres du cosmos, mais plutôt en tant qu’il est leur condition de possibilité et leur salut. Moltmann ajoute:

Le discours du « Christ cosmique » n’a pas pour sens d’encadrer le Christ dans les lois et les rythmes du cosmos actuel, mais seulement – et inversement – de soumettre ces pouvoirs et lois cosmiques à sa seigneurie qui établit la réconciliation[5].

Toutefois, dans sa nature humaine, le Christ cosmique assume le monde tel qu’il est, dans ses rythmes et dans ses temps (creatio continua) et c’est pour ce monde-là qu’il est rédempteur et sauveur, en tant qu’il est en même temps la promesse et la garantie du salut du monde, sous la forme d’une réconciliation cosmique à la fin des temps. De ce point de vue, on ne peut penser au Christ que d’une manière inclusive. Et quiconque pense à lui en terme exclusifs, non pour les autres, mais contre les autres, n’a pas compris le Conciliateur du monde[6].

Notes


[1] k. wiśniewski, Creazione aperta – la dottrina di Jürgen Moltmann, «Teologiczno-Historyczne  Rok IX» 1-16 (2010) 18.

[2] Gn 1,31.

[3] Col 1, 16-17

[4] J. Moltmann, Dio nella creazione. Dottrina ecologica della creazione, Queriniana, Brescia 1986, 118. La traduction française est de Joël francis Ohandza.

[5] J. Moltmann,  La via di Gesù Cristo. Cristologia in dimensioni messianiche, Queriniana, Brescia 1991, 314.

[6]  Ibid, 311.


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