John Walton est professeur d’A.T. au Wheaton College dans l’Illinois, auteur et éditeur de nombreux commentaires l’A.T. Tout au long de ses recherches, Walton a porté son attention sur la comparaison de la culture et de la littérature biblique et de celle du Proche Orient ancien. Il a publié des dizaines de livres, des articles et des traductions, dont son dernier ouvrage : The Lost World of Genesis One (Le monde perdu de Genèse 1). Il est en accord avec l’interprétation littéraire de la Genèse défendue par un grand nombre de spécialistes comme Henri Blocher en France (La révélation des origines) mais il va plus loin. Dans son ouvrage qui suscite un débat, Walton défend une interprétation originale. Walton pense que le verbe bara (créer) dont nous avons déjà parlé sur ce blog ne décrit pas l’origine matériel des éléments du cosmos, mais l’attribution par Dieu d’une fonction ou d’un rôle à jouer à chacun de ces éléments. La structure en 7 jours décrit selon lui les étapes avant l’inauguration de l’univers par Dieu en tant que temple cosmique le 7ème jour.

http://biologos.org/blog/reconciling-science-with-scripture/

 

La science et l’Ecriture réconciliée

Pour beaucoup d’entre nous qui prenons la Bible au sérieux, notre approche de la relation entre la Bible et la science est conditionnée par notre foi dans la véracité de la Bible. Si la science empirique est perçue comme fournissant une explication qui dévaluerait ou nierait la vérité de la Bible, un dilemme se crée alors et il nous faudrait choisir entre les deux.

Avant de faire de tels choix, ceux qui prennent la Bible au sérieux devraient se poser cette question : « Quelles sont les vérités de l’Ecriture que je devrais me tenir prêt à défendre ? » Je voudrais avancer que nous ne devrions pas nous sentir obligé de défendre la « science » contenue dans la Bible, parce que la vérité biblique n’y est pas contenue. Ceci ne devrait pas être une pensée inconfortable. Au cours des siècles pendant lesquels la Bible a été écrite, des générations de lecteurs ont soutenu des points de vue scientifiques très divers. Si chaque génération avait l’impression que la Bible devait être réconciliée avec la science de son temps, cela aurait un certain coût- lorsque la science progresserait, la science de la Bible ne serait plus valide. Plutôt que de penser que la science de la Bible devrait être infiniment flexible pour pouvoir être réconciliée avec tous les points de vue de chaque génération, il est préférable de comprendre que la Bible n’offre pas de science. Au lieu de cela, la vérité communiquée est indépendante de la science du monde ancien dans lequel la parole de Dieu a été communiquée.

Dans le monde ancien, les gens croyaient que la terre était plate, que le soleil tournait autour de la terre, que la pluie tombait d’une masse d’eau retenue par quelque chose de solide ; que les gens pensaient avec leurs entrailles ; que les étoiles se trouvaient dans la même zone que la lune, le soleil, les oiseaux et les nuages. Dieu n’a pas cherché à leur donner une information différente ; il ne leur a pas révélé la « vraie » science. En conséquence, la science de la Bible n’est pas ce que nous devrions chercher à défendre lorsque nous cherchons à comprendre la vérité qu’elle enseigne.

J’ai proposé que nous pouvons véritablement avancer dans une analyse renouvelée de ce que le texte biblique  de Genèse 1 communique effectivement. Ceux qui parmi nous prennent la Bible au sérieux croient que la Bible a été donnée par Dieu pour chacun d’entre nous. Pourtant, dans le même temps, il est évident qu’elle n’a pas été donnée directement à nous. Elle n’a pas été écrite dans notre langue, ni communiquée dans notre culture et dans notre état d’esprit.

Notre compréhension de Genèse 1 changera radicalement si nous comprenons deux détails importants à propos du monde ancien. La première est que les gens étaient beaucoup plus intéressés par des problèmes comme l’ordre, la fonctionnalité, le rôle de chaque chose plutôt que par l’aspect physique du monde matériel. Ainsi, leur pensée même à propos de la création est bien davantage orientée vers les fonctions que les origines matérielles du monde physique. La création a bien plus affaire avec la préparation, l’identité et l’affectation d’un rôle plutôt que dans les structures physiques et leurs composants. Dans mes écrits, j’ai essayé de mettre ceci en évidence à partir des textes bibliques et des connaissances du monde ancien et j’ai essayé de démontrer que pour l’auteur et les premiers auditeurs de la Genèse, le chapitre 1 est le récit des origines fonctionnelles, et non pas matérielles. « La création » impliquait l’affectation de fonctions et d’ordre plutôt qu’une fabrication matérielle du monde physique.

Le second détail concerne le 7ème jour. Ce dont nous ne sommes pas conscients, c’est que dans la Bible et dans le monde ancien, Dieu demeure dans un temple. En fait, on construit des temples pour que Dieu puisse y habiter. Ainsi, lorsqu’il nous est reporté qu’au 7ème jour Dieu s’est reposé, cela contient sans l’ombre d’un doute l’idée que le cosmos est présenté comme un temple. Il était très courant à cette époque d’associer étroitement le temple et le cosmos, car le temple était considéré comme un micro cosmos. Le chiffre 7 était souvent utilisé en rapport avec les inaugurations de temples, ainsi la structure en 7 jours de Genèse 1 confirme probablement l’identification de ce chapitre en tant que texte traitant d’un temple cosmique. Cela en fait le jour le plus important de la semaine de création, parce que si Dieu ne vient pas y régner, ce temple ne remplit pas sa fonction.

Si nous avons raison d’identifier Genèse 1 comme le compte rendu de la création permettant d’inaugurer le temple cosmique et ses différentes fonctionnalités, alors grâce à cette interprétation, nous pourrons exprimer les vérités véhiculées par l’auteur biblique. Si nous cherchons à prendre la Bible au sérieux, nous n’aurons ainsi plus à chercher à défendre la vision « biblique » de l’âge de la terre. L’âge de la terre est une question d’ordre matériel qui n’est pas le but d’un compte rendu à propos des fonctions de chaque élément. Si Genèse 1 n’est probablement pas un récit des origines matérielles, la Bible ne propose aucun récit des origines matérielles. Si tel est le cas, alors la science empirique ne peut pas proposer de vision des origines matérielles que nous devrions rejeter pour défendre la Bible. La Bible insiste simplement sur le fait que Dieu est le créateur et que quelque que soit la méthode, il est à l’origine de cette création. Lorsque nous lisons de la science dans ce texte ou que nous construisons de la science à partir du texte, nous suivons nos agendas modernes, plutôt que de défendre et d’expliquer la vérité du texte biblique.

Bien que Genèse 1 ne soit probablement pas un récit des origines physiques, Dieu est toujours considéré comme celui qui est responsable de cette origine matérielle, qu’il utilise des procédés que les scientifiques peuvent étudier et qui se sont étalés sur de longues périodes, ou qu’il utilise des actes instantanés que nous ne pourrions jamais expliquer par la méthode scientifique. Dieu est le seul créateur, et il agit avec intentionnalité. Ce sont les vérités que nous défendons et que Genèse 1 affirme.

 

Notes du traducteur (Benoît Hébert)

Je ne suis pas pleinement convaincu par la lecture de John Walton de Genèse 1. En particulier avec le fait qu’il ne s’agirait pas du tout d’une description matérielle de la création, mais uniquement d’une attribution de certaines fonctions aux éléments du cosmos. J’ai cependant choisi de traduire cet article pour les raisons suivantes. John Walton est un exemple frappant de théologien de l’A.T. parmi les plus reconnus dans le monde évangélique traditionnel (et donc non catalogué de « libéral »), qui renonce au concordisme scientifique en matière d’interprétation de la Genèse. Walton n’a pas de mal à reconnaître que l’A.T. a été écrit dans une perspective ancienne du cosmos (le firmament solide…) et de la géographie  (terre plate…) et il accepte le principe d’ « accomodation » ou de condescendance du Saint Esprit dans le processus d’inspiration. L’importance de l’attribution des différentes fonctions aux éléments du cosmos a peut-être été sous estimée dans les autres interprétations, de là à rendre cet aspect exclusif dans l’interprétation du verbe bara et de Genèse1…
Je vous recommande néanmoins la lecture de The Lost World of Genesis One, faites vous votre propre opinion !

http://www.amazon

Article déjà publié le 10/03/2010