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Le sens théologique de l'évolution


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Comprendre le début à la lumière de la fin : Réflexions eschatologiques restituant le sens théologique de l’évolution

PARTIE 5 :

 

Le péché et la mort dans une perspective eschatologique

 

À la lumière de la vision eschatologique du devenir humain telle que proposée dans cet article, le péché est une possibilité existentielle qui ne se présente qu’avec l’émergence de la personne humaine. Auparavant, en tant que créatures n’ayant pas encore atteint le statut de personne, les ancêtres préhumains de l’homme moderne se comportaient de manière similaire aux autres animaux car un tel comportement avait longtemps favorisé la survie.[1]

Selon les normes de l’homme moderne, nous jugeons que la plupart de ces comportements sont répréhensibles mais pas pécheurs au sens théologique proprement dit (par exemple, il n’est pas pécheur pour un animal prédateur de tuer et de manger sa proie). Avec l’émergence de l’humain, cependant, nous avons maintenant des êtres avec lesquels Dieu est en relation personnelle, des êtres que Dieu équipe de façon unique et appelle à refléter l’image divine en imitant le caractère de Dieu et en promouvant ses desseins pour la création à titre de représentants de Dieu. Les habitudes et les comportements de la créature qui étaient auparavant moralement neutres acquièrent une dimension éthique car ils doivent maintenant être considérés dans le domaine émergent de la personne humaine. En conséquence, avec l’émergence des êtres humains vient aussi la possibilité existentielle du péché (et la possibilité de la mort spirituelle théologiquement parlant).[2] Le péché résulte du refus délibéré de suivre l’appel gracieux de Dieu à transcender la simple existence de créature ; c’est un refus d’embrasser notre destinée eschatologique en tant que porteurs d’image et participants à la nature divine (2 Pier. 1:4).[3]

 

L’appel à être humain est à la fois un don à recevoir dans le présent et un destin eschatologique à poursuivre par la suite assisté par la grâce active, initiatrice et habilitante de Dieu. Si « être humain comme don » est quelque chose que nous recevons simplement de Dieu, « être humain comme destin » est quelque chose à laquelle nous pouvons résister, déformer et même finalement refuser ou ignorer. Personne ne peut devenir pleinement humain au sens ultime du terme sans la grâce permanente de Dieu jusqu’à rendre parfait; et, à la lumière du péché, personne ne peut devenir pleinement humain au sens rédempteur (c’est-à-dire nouvelle création, nouvelle humanité) sans la grâce active, rédemptrice et salvatrice de Dieu. Nous faisons tous inévitablement l’expérience de la réalité du péché et sommes coupables de le perpétuer, mais par la grâce justifiante, sanctifiante et glorifiante de Dieu, nous sommes pardonnés, purifiés et attendons avec impatience notre transformation finale à la ressemblance du Christ. Cette œuvre transformatrice et salvatrice du Dieu trinitaire imprègne et transcende ainsi notre développement évolutif. Comme le suggère Ted Peters, la nouvelle création eschatologique de Dieu est une attraction de l’avenir, et pas seulement une poussée du passé.[4]

 

Notre transformation en Christ partage une continuité avec notre histoire évolutionnaire mais n’est pas déterminée par elle. L’acte « ultime » de la grâce salvatrice de Dieu à l’égard de la création actuelle est transcendant et contingent, plutôt qu’immanent et nécessaire, il impacte déjà, dirige et donne un sens cohérant ici-bas.[5] Notre prototype est le Christ, et non Adam ; ce n’est qu’au profit de la résurrection du Christ que nous entrerons pleinement et définitivement dans la nouvelle création, notre anticipation chargée d’espérance de cette résurrection réoriente déjà et redéfinit notre existence « en Christ ».

 

Conclusion

Dans cette série d’articles, j’ai fait valoir qu’une herméneutique eschatologique trinitaire, appliquée à la doctrine de la création, nous aide à donner un sens théologique à l’évolution. Mon intention n’a pas été de tenter de régler toutes les questions que l’évolution soulève pour la théologie, mais d’offrir un cadre théologique dans lequel nous pouvons discuter de ces questions de manière fructueuse et proposer des solutions provisoires qui respectent l’intégrité de la science et de la théologie alors que nous cherchons à comprendre le monde complexe et glorieux que Dieu a créé.

 

 

Cette série d’articles est la traduction de la version originale de l’article PSCF – ASA vol 66 No 3 (sept 2014) disponible en ligne ici : http://www.asa3.org/ASA/PSCF/2014/PSCF9-14Franklin.pdf

Traduit de l’anglais avec autorisation Par Jean-Pierre Adoul.

 


Notes

[1] Daniel Harlow l’exprime bien quand il écrit, Ici, une série de preuves établit que pratiquement tous les actes considérés comme « pécheurs » chez l’homme font partie du répertoire naturel du comportement des animaux… y compris la tromperie, l’intimidation, le vol, le viol, le meurtre, l’infanticide et la guerre, pour n’en citer que quelques-uns. [Ainsi,] loin d’infecter le reste de la création animale avec nos comportements égoïstes, nous, humains, avons hérité ces tendances de notre passé animal. (Daniel C. Harlow, « After Adam : Reading Genesis in an Age of Evolutionary Science », Perspectives on Science and Christian Faith 62, no. 3 [2010] : 180). Voir également Murphy, « Roads to Paradise« , 114.

[2] Harlow fait une remarque similaire (Harlow, « After Adam, » 191).

[3] Je n’ai pas l’intention ici d’offrir une définition exhaustive du péché (un concept complexe véhiculé par des récits et des métaphores diverses et riches dans toute l’Écriture), mais seulement de présenter la condition de péché dans une perspective eschatologique.

[4] 115 La déclaration de Peters selon laquelle Dieu crée « à partir de l’avenir et non du passé » doit être mise en cohérence avec ce qu’il dit ailleurs. Je préfère parler de la création de Dieu au sein du passé, du présent et de l’avenir, à mesure que la présence et le pouvoir de l’Esprit intensifie pour faire avancer la création vers l’aboutissement envisagé par Dieu. Dieu « tire » à la fois le présent et le passé vers le futur (attraction eschatologique) et pousse la création vers l’avant par l’arrière (car l’œuvre créatrice passée de Dieu a des effets qui impactent le présent). En ce qui concerne notre transformation en Christ, tandis que la résurrection de Jésus est un facteur déterminant en ce qui concerne notre avenir comme êtres humains (nous ressusciterons avec lui), son incarnation est déterminante pour notre présent (nous mourons toujours en lui). Ainsi, je trouve la déclaration de Peters qui suit  plus satisfaisante : « Chaque moment où Dieu soutient le cosmos en existence, fournit un eventail de potentialités qui rend l’inattendu possible, libérant le moment présent de l’emprise absolue du déterminisme passé » (Peters, Anticipating Omega : Science, Faith, and Our Ultimate Future [Göttingen : Vandenhoeck & Ruprecht, 2006], 12, 14).

[5] Dietrich Bonhoeffer, Ethics, Dietrich Bonhoeffer Works, vol. 6, ed. Clifford J. Green, trad. Reinhard Krauss, Charles C. West, et Douglas W. Stott (Minneapolis, MN : Fortress, 2005), 146-70

 

 


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