Article 4 sur un total de 14 pour la série :
Cher Ami,
Dans mes deux courriers précédents, je t’avais successivement entretenu de deux sujets qui paraissent étonnants – voire troublants – à bien des athées, à savoir : la question des chrétiens non pratiquants et celle de la multiplicité – pour ne pas dire la multiplication – des dénominations « chrétiennes ». Cela nous amène à considérer aujourd’hui le problème des sectes.
En fait, de l’avis de tous les spécialistes qui se sont penchés sur la question, la notion de « secte » est impossible à définir. Etymologiquement, ce mot n’a d’ailleurs rien de péjoratif, puisqu’il signifie « suivre une ligne de conduite ». Mais dans le langage de tous les jours, il sert à définir des groupes peu sympathiques et même quelque peu effrayants. Je l’utiliserai donc dans son sens commun, pour désigner des personnes intolérantes, ou des groupements qui violent les libertés individuelles et qui manipulent leurs semblables à des fins idéologiques ou mercantiles.
Avant toute chose, il faut savoir que toutes les grandes églises – catholique, orthodoxe, protestante, anglicane, etc. – ont été considérées comme des sectes avant d’accéder au très « honorable » statut d’églises chrétiennes. Le Christianisme lui-même, en ses débuts, fut considéré comme une secte du Judaïsme ; et chacune des églises citées ci-dessus est le fruit d’une division « sectaire »… Et de fait, on peut très bien admettre qu’un groupe de chrétiens quitte une église qui lui paraît infidèle à l’Evangile de Jésus-Christ. La question de savoir si c’est à tort ou à raison, demeure une question tout à fait subjective ! Mais si l’on admet que c’est avec raison, il faut aussi reconnaître que le petit nombre de ses membres ne peut absolument pas suffire à définir une secte.
Une autre tentation – surtout à notre époque, ou la mode est de tout relativiser – c’est de traiter de « sectaire » toute personne qui présente de solides convictions… que ce soit dans le domaine religieux ou en tout autre, d’ailleurs ! Pourtant, ce n’est pas d’avoir des convictions qui est une attitude sectaire, mais bien de vouloir les imposer à tout le monde, ou alors, de ne point tolérer que d’autres pensent autrement. De façon très paradoxale, les gens qui n’ont pas de convictions philosophiques ou religieuses peuvent se montrer très sectaires et très intolérants envers ceux qui expriment leurs convictions en tout bien tout honneur.
Par ailleurs, il est vrai que beaucoup de dénominations se présentent comme seules détentrices de « la » vérité révélée, ou comme pratiquant une morale bien supérieure à toutes les philosophies athées. Cette arrogance intellectuelle ne manque pas d’irriter les athées qui – à juste titre – se sentent agressés par un jugement aussi arbitraire… Aussi, nous en parlerons la fois prochaine. Cela dit, il n’est pas rare que l’on trouve des gens sectaires au sein de communautés tolérantes, et des personnes tolérantes dans des dénominations sectaires… Cela pourrait également faire l’objet de réflexions ultérieures.
A bientôt !
R.L.
14 Articles pour la série :
- Lettre à un ami athée (1)
- Lettre à un ami athée (2)
- Lettre à un ami athée (3)
- Lettre à un ami athée (4)
- Lettre à un ami athée (5)
- Lettre à un ami athée (6): morale « chrétienne », morale « athée »…
- Lettre à un ami athée (7): le christianisme: une simple « morale »?
- Lettre à un ami athée (8): éthique, loi ou responsabilité?
- Lettre à un ami athée (9): les chrétiens devraient-ils imposer à tous leurs choix éthiques?
- Lettre à un ami athée (10) faut-il confondre foi et législation?
- Lettre à un ami athée (11): de la diversité des dénominations chrétiennes
- Lettre à un ami athée (12): foi ou religiosité?
- Lettre à un ami athée (13): superstition ou relation véritable?
- Lettre à un ami athée (14): la balle est dans ton camp!