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Une découverte qui ne met pas le bourdon

L’interaction biologique entre les insectes pollinisateurs et les plantes qu’ils pollinisent nécessite une bonne synchronisation : les insectes dépendent de la production de pollen pour leur alimentation et celle des larves à la sortie de l’hiver, tandis que les plantes ont besoin des pollinisateurs pour assurer leur reproduction.  Chez les bourdons, la mise en place de nouvelles colonies au printemps doit donc se faire alors que les plantes qu’ils pollinisent sont en pleine floraison, et les plantes ont aussi besoin que les pollinisateurs soient présents lorsqu’elles fleurissent, sinon pas de reproduction ! On s’attend donc à ce que les pollinisateurs soient abondants lors des pics de floraison.

 

Cette synchronisation peut être perturbée par l’environnement comme par exemple l’augmentation de la température due au changement climatique : les pollinisateurs sont sensibles à la température et donc vont sortir d’hibernation plus tôt tandis que la floraison des plantes est déclenchée par la durée du jour qui elle ne change pas.

 

Une étude[i] publiée dans la revue Science du 21 mai 2020 décrit une expérience qui révèle une action insoupçonnée des pollinisateurs pour assurer cette synchronisation avec les plantes qu’ils pollinisent. En conduisant des études en laboratoire sur des colonies de bourdons d’élevage (bourdons terrestres) et en conditions semi-naturelles, des chercheurs de l’ETH de Zürich ont démontré la chose suivante : lorsque les bourdons sont affamés et qu’ils rencontrent des plantes qui ne fleurissent pas encore, ils entaillent leurs feuilles avec leurs mandibules. Ces blessures infligées ont pour effet d’induire plus rapidement la floraison et donc de limiter ce manque de synchronisation.  En reproduisant ces blessures avec un scalpel, les chercheurs n’ont pas réussi à induire la floraison, suggérant que les bourdons doivent injecter une substance dans les plantes qu’ils blessent et qui induit cette floraison. Ce phénomène a été observé aussi sur des bourdons sauvages.

Nous avons vraisemblablement à faire à un phénomène de co-adaptation : des bourdons qui adaptent leur comportement en fonction de la présence ou non de pollen, et des plantes qui répondant à ce stimulus vont donc fleurir lorsque les pollinisateurs sont présents.

 

Petit aparté philosophique

Puisque nous sommes  sur le blog de Science & Foi, nous ne bouderons pas notre plaisir à laisser exprimer notre sentiment d’émerveillement en tant que croyants.

Pour le croyant, Dieu est le Créateur, nous voyons avec cet exemple, qu’il a créé une Nature qui est résiliente, c’est-à-dire qui peut affronter des changements environnementaux, s’adapter à de nouvelles conditions ; une Nature dynamique qui évolue. Nous pouvons nous joindre au Psalmiste et dire avec lui « Que tes œuvres sont grandes ! » (Ps 92:6).

Est-ce que cela veut dire que finalement nous n’avons pas à nous inquiéter du réchauffement climatique, et plus globalement de l’effet de l’activité humaine sur notre environnement, car la Nature s’en sortira toujours ?

C’est oublier que nous avons été mandatés par Dieu pour prendre soin de cette Nature, mais aussi que si la vie s’adapte, comme un élastique, à trop tirer dessus…ça casse !

 

 

Notes

[i] Pashalidou et al., Science 368, 881–884 (2020), [en ligne https://science.sciencemag.org/content/368/6493/824]