Article 2 sur un total de 2 pour la série :

Débat sur les différentes approches de Genèse 1-3 au Québec


Dans la deuxième partie de cet article, je vais m’intéresser aux 3 différentes positions qui se sont affrontées lors du débat sur l’interprétation des premiers chapitres de la Genèse. Mais je vais surtout développer l’approche contextuelle et littéraire des récits fondateurs.

Mise en contexte

Rappelons tout d’abord que ce débat a eu lieu au Québec à l’église le Portail en décembre dernier. Il a été organisé et modéré par le pasteur principal de l’église le Portail Gaétan Brassard. Ce dernier préparait alors une série de 10 messages sur les premiers chapitres de la Bible. Il a voulu entendre s’exprimer et se confronter 3 positions différentes tenues par des responsables évangéliques québécois sensibles à la question.

La vidéo du débat sera diffusée dans son intégralité sur Youtube vraisemblablement au mois de mars 2014. Nous en tiendrons informés les lecteurs de ce site.

Ayant participé personnellement à ce débat, je vais m’attarder à expliquer la position que j’y ai défendue. Il s’agit d’une interprétation « contextuelle et littéraire » qui se veut conciliante avec les théories scientifiques contemporaines (théorie du Big Bang et de l’évolution). Cela peut sembler aller de soi pour nombres de lecteurs protestants. Mais au Québec, j’évalue qu’au moins 90% des évangéliques croient que les premiers chapitres de la Bible doivent être compris au premier degré, en leur sens littéral et historique.

De fait, j’avais devant moi deux leaders évangéliques reconnus et respectés – Laurence Tisdall et Jean-Sébastien Morin – qui rejetaient la théorie de l’évolution. Le premier, M. Tisdall, adhère à ce qu’on appelle un créationnisme littéral et une interprétation « littéraliste » des textes. Pour lui, le sens voulu par l’auteur est le sens historique et scientifique. M. Morin, pour sa part, a adopté une interprétation littéraire mais non-évolutionniste pour des raisons philosophiques. Il pense que Dieu a créé un univers adulte. Pour lui, le référent et le symbole sont assez proches et il veut préserver un lien entre le référent littéraire et la réalité. Cela donne toutefois à penser que derrière les versets du texte se cacheraient des vérités scientifiques que la science actuelle ne saisit pas…

 

Une lecture innovante de la Genèse

Pour ma part, l’approche que j’ai tenue à défendre voulait tenir davantage compte de la double paternité divine et humaine de la Bible. Pour déterminer l’intention du texte inspiré, l’interprète doit soigneusement considérer le genre littéraire ainsi que le contexte socioculturel des premiers destinataires. Il doit faire l’effort de replacer le texte dans son contexte d’origine afin de saisir le mieux possible le sens qu’il avait pour les premiers destinataires. Et il cherche à mieux connaître les préoccupations que voulait adresser l’auteur inspiré.

 

Cette approche est celle adoptée par de plus en plus de théologiens évangéliques – Alister McGrath, N.T. Wright, Peter Enns. Elle fait une distinction entre le message théologique (et existentielle) inspiré et les éléments de culture qui servent de véhicule pour transmettre la Révélation divine au peuple de Dieu. Elle cherche à s’approprier les vérités de foi et de vie que contient la Parole de Dieu. Elle ne cherche pas dans les textes anciens une chronologie historique ou scientifique, mais une théologie.

 

Elle voit dans la Bible une révélation « contextuelle » qui répond d’abord aux préoccupations des premiers destinataires. Et non pas une révélation « intemporelle » qui viendrait répondre directement à toutes les préoccupations anciennes et modernes (de type historique et scientifique). Elle comprend que les questions des premiers destinataires pouvaient être forts différents des nôtres.

 

Le problème avec une interprétation « littéraliste » est justement de ne pas assumer pleinement cette contingence, cette paternité humaine qui fait de la Bible une Parole de Dieu incarnée dans des paroles humaines. Poussé à son extrême limite, le littéralisme nie l’humanité de la Parole. Elle tombe dans l’erreur monophysite.

 

Rapport Bible et Science

Par rapport  au débat création / évolution, nous avons tenu à dire que c’est un faux débat. Car considérant :

  1. la construction littéraire des premiers chapitres de la Genèse (hymne didactique, écrit narratif de sagesse),
  2. la vision préscientifique des auteurs,
  3. que les vérités théologiques et les vérités scientifiques sont de deux ordres différents, les premières étant éternelles et inerrantes, les secondes étant contingentes et changeantes…

Nous pensons qu’il faille tenir en harmonie la Bible et la Science, et sortir ainsi de l’impasse actuelle dans le milieu évangélique.

 

Le débat création-évolution est donc un faux débat, car il n’est pas celui des auteurs bibliques, mais le nôtre. Ce n’était pas une controverse pour eux, mais ça le devient pour le lecteur moderne qui essaie de trouver dans un texte du Proche Orient Ancien des réponses soulevées par la science moderne. Le problème n’est donc plus entre « création » et « évolution », ou entre les « Écritures » la « Science », mais entre une « l’interprétation littéraliste » de Genèse et la science !

 

Mentionnons en terminant que le pasteur Gaétan Brassard semble avoir opté pour cette option dans le deuxième message de sa série « Origine » que nous suivons passionnément. Nous vous invitons à regarder la vidéo ici : http://www.egliseleportail.com/serie/94-origines/437-1-la-creation


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Débat sur les différentes approches de Genèse 1-3 au Québec