Article 2 sur un total de 4 pour la série :

Les arguments du Nouvel Athéisme sont-ils recevables? ♥♥♥


Le cœur du livre d’Alister McGrath « Pourquoi Dieu ne s’en ira pas » est constitué de trois chapitres destinés à répondre aux arguments du « Nouvel Athéisme » à propos des rapports entre violence et religion, de la rationalité de la foi, et de la question des preuves de la foi et de son rapport à la science.

Alister McGrath utilise fréquemment le mot « religion », le lecteur pourra le plus souvent (mais pas toujours) le remplacer avantageusement par « foi chrétienne ».

« Violence : quand la religion part de travers. »

Ayant grandi en Irlande du Nord où les conflits catholiques vs protestants ont été particulièrement violents, Alister McGrath n’a aucun mal à reconnaître que :

 « Sans aucun doute, la religion peut déraper, et lorsqu’elle le fait, elle doit être confrontée et doit changer. Les prophètes d’Israël et Jésus de Nazareth ont été des réformateurs qui ont remis en question les conventions religieuses de leur époque. De manière similaire, on pourrait considérer que la critique de la religion du Nouvel Athéisme pourrait aider à discerner où la réforme serait nécessaire aujourd’hui. Alors que la plupart des gens voit la religion comme quelque chose qui peut aller mal, le Nouvel Athéisme semble la considérer comme quelque chose qui est mauvais. »

« La religion empoisonne-t-elle tout ? »

Alister McGrath commence par souligner que le mot « religion » n’a pas de définition précise. « Il existe des religions individuelles, la catégorie universelle « religion » n’existe pas. ». Une critique générale de la « religion » sans prendre la peine de définir précisément de ce dont il s’agit n’a pas beaucoup de sens. La foi chrétienne n’est pas une simple spiritualité, ni une vision philosophique du monde.

« Le concept imprécis poreux de religion s’étend bien au-delà de ceux qui croient en Dieu, embrassant une grande variété de croyances et de valeurs. »

Il ne faut pas confondre religion et spiritualité, « certaines traditions religieuses comme le bouddhisme, n’ont pas de notion de Dieu. »

« L’historien Martin Marty a justement noté le manque de définition fiable de la religion, et il identifie cinq de ce qu’il pense être des caractéristiques de ce qu’on peut qualifier de religion : la religion se focalise sur nos « préoccupations ultimes », elle construit une communauté, elle fait appel à des mythes et des symboles, elle se renforce au travers de rites et de cérémonies, et elle demande certains comportements de la part de ses adhérents. Martin Marty remarque que tout ceci est également caractéristique des mouvements politiques. Il n’est pas déraisonnable de dire que, si la religion est dangereuse à la base, alors la politique l’est aussi. Comme beaucoup l’ont fait remarquer récemment, la politique se transforme facilement en religion quand elle se considère comme d’importance ultime. Il peut y avoir (et il y a) des fanatiques politiques, tout comme il peut y avoir (et il y a) des fanatiques religieux. Le problème, c’est le fanatisme, pas la religion elle-même. » (p 67)

« Le Christianisme et la non-violence »

Alister McGrath fait justement remarquer que Jésus-Christ a été un adepte de la non-violence « dans ses enseignements et dans ses actes. »

« Il a été l’objet, et non l’agent, de la violence. De même, les chrétiens sont appelés à tendre l’autre joue et à ne pas laisser le soleil se coucher sur leur colère au lieu de répondre à la violence par la violence, à la haine par la haine. Je n’ai aucun doute que beaucoup de chrétiens ne se comportent pas ainsi. Mais cela montre peut-être simplement qu’ils ne sont pas de très bons chrétiens. » (pp 69-70)

Alister McGrath relate l’histoire poignante de l’assassinat en 2006 de cinq jeunes filles Amish dans une école, par un tueur qui se suicidera en laissant un mot dans lequel il déclare sa haine contre Dieu. Les familles des victimes, qui se déclarent disciples de Jésus ont répondu non pas par la haine, mais en offrant le pardon.

« Remplie d’émotions, la veuve du tueur a alors exprimé sa reconnaissance, expliquant comment cette attitude avait permis une « guérison » dont elle et ses trois enfants avaient « si désespérément besoin ». Le cycle de la violence était ainsi rompu avant d’avoir commencé. » (p 70-71)

Après avoir montré que le Christianisme authentique est fondamentalement non-violent, Alister McGrath donne des exemples d’idéologies qui n’ont rien de « religieuses » et qui historiquement ont produit beaucoup de violence et d’intolérance. La violence n’est donc pas le monopole de ceux qui instrumentalisent la foi.

« La violence de l’athéisme contre la religion »

« L’histoire du vingtième siècle nous a rendu conscient de façon effrayante du fait que l’extrémisme politique peut être cause de violence […] Comme jamais dans l’histoire humaine, tant de personnes ont été massacrées au nom d’idéologies sécularisées, de récits méta narratifs et de visions du progrès[…], que ce soit le quasi paganisme du Nazisme ou l’athéisme de Staline. » (p 72)

Alister McGrath nous raconte comment, à sa racine, l’idéologie communiste de Lénine et la Révolution russe ont été fondée sur un athéisme militant et des structures de propagande jusqu’à l’oppression physique visant à éliminer toute croyance en Dieu, en particulier le Christianisme.

« Dawkins donne l’impression d’être dans le déni de cette face sombre de l’athéisme, ce qui fait de lui un critique moins que crédible de la religion. »

« Les idéaux séculiers et la violence »

Alister McGrath note que certaines formes de religion conduisent par leurs idées à des conflits « entre le bien et le mal. ».

« Pourtant, quand une société rejette l’idée de Dieu, elle a tendance à rendre transcendantes les alternatives séculières, comme les idéaux de liberté et d’égalité…bien que sécularisées dans leurs apparences, certaines visions du monde prennent la forme d’un système plus ou moins développé de croyances, de mythes, de rituels, et de symboles qui créé une aura sacrée autour d’une entité appartenant à ce monde et le transforme en un culte et un objet d’adoration et de dévotion. Le résultat est inévitable : une tendance à l’intolérance et la violence lorsque de tels objets séculiers de dévotion sont remis en question ou menacés. » (p. 77)

L’exemple de la terreur (« des exécutions de masse de milliers d’ »ennemis de la révolution » en une année. » (1794)) lors de la révolution française dont la devise était « liberté égalité, fraternité » est une illustration décapante de cette réalité.

« Robespierre affirmait que la terreur était vertueuse parce qu’elle essayait de maintenir la Révolution et la République. : « La terreur n’est rien d’autre qu’une justice inexorable et sévère qui découle de la vertu. » En d’autres mots, c’est une forme de violence rationnelle, par opposition à des formes religieuses de violence. » (p. 78)

« Robespierre finit par être victime de la même terreur rationnelle qu’il avait défendue. Etant tombé en disgrâce, il fut envoyé à la guillotine en 1794. » (p. 78)

Conclusion

« Je suis tout entier pour la réforme et l’autocorrection de la religion, mais je pense que le Nouvel Athéisme devrait montrer une volonté similaire à se soumettre à une autocritique intellectuelle et morale, et à être un peu plus honnête à propos de ses propres difficultés. » (p. 80)

Dans un prochain article, nous aborderons l’analyse d’Alister McGrath à propos de la rationalité de la foi.


4 Articles pour la série :

Les arguments du Nouvel Athéisme sont-ils recevables? ♥♥♥