Depuis sa sortie en salle, le film événement a poussé tous les curieux à se poser les mêmes questions sur son réalisme à propos de la vie spatiale et des événements retranscrits par le cinéaste Alfonso Cuarón.
Les média se sont arrachés les vedettes de la NASA ou de l’agence spatiale européenne comme en témoignent de nombreux sites journalistiques et pas seulement scientifiques avec des interviewes en vidéo, ou certaines revues comme Science et Avenir dans son n° spécial high tech de novembre qui fit décrypter le film à Claudie Haigneré et Jean-François Clervoy 2 ex-astronautes français.
Certains professionnels de l’espace ont d’ailleurs d’eux-mêmes largement contribué au débat, à l’instar de l’astrophysicien et directeur du Planetarium Hayden, Neil DeGrasse Tyson et sa série de tweets lancés au sortir de sa séance ou de buzz Aldrin en personne (le célèbre compagnon de Neil Amstrong) qui soulignait pour sa part une image un peu trop clinquante donnée à la terre dans l’espace… Ceci dit le « corps spatial » est unanime pour reconnaître au film un intérêt certain par son immersion et un spectacle impressionnant sous bien des aspects à découvrir dans notre questionnaire.
Vous êtes incollable sur le sujet ou simplement curieux de rapprocher les choix du cinéaste avec la réalité ? Suivez ce petit quizz en déroulant les onglets « réponse » situées sous les questions après avoir tenté d’y répondre, comptez vos points…
… Et partager vos résultats ou remarques dans un commentaire.
QUIZZ
Le rendu en apesanteur dans l’espace est-il convenablement restitué par les acteurs et l’environnement ?
Réponse
OUI.
C’est indéniablement le gros plus de la fiction, enfin un film qui mérite sa 3D !
Quant au réalisme, il est tout à fait saisissant au point d’en émoustiller les professionnels de l’espace ! Que ça soit outre-atlantique avec l’ancien astronaute Garrett Reisman :
« Moi qui ait fait trois sorties dans l’espace, je peux vous dire que c’est du vrai ! L’impact visuel que représente le fait d’avoir une simple visière transparente entre vous et la Terre est très bien rendu. De même que la facilité à démarrer un mouvement et la difficulté à le stopper dans le vide de l’espace »
ou plus proche de chez nous, Jean-François Clervoy, ancien astronaute français qui confie à ladepeche.fr :
« J’ai été totalement bluffé par le film… J’ai d’ailleurs dit au réalisateur, Alfonso Cuarón, quand je l’ai rencontré : «Vous m’avez renvoyé dans l’espace». Au début, dès les premières images, je me suis cru reparti là-haut ! J’ai eu l’impression de revivre mes missions et avec le sentiment que c’étaient des images que j’avais tournées moi-même… »
Il n’y a guère que notre twitter astrophysicien Neil DeGrasse Tyson pour jouer les rabats-joie (certainement par le fait qu’il n’a jamais quitté le plancher des vaches..) et de nuancer : que la coiffure bien arrangée de l’actrice ne subit jamais les effets de l’apesanteur ce qui nuit au réalisme du film…
Est-il possible qu’un nuage de débris vienne heurter un objet dans l’espace à intervalle régulier ?
Réponse
OUI.
Par exemple la Station Spaciale Internationale (ISS) orbite autour de la terre à la vitesse de 28 000 km/h.
Les débris expulsés d’un satellite par une explosion pourraient acquérir une vitesse relative plus élevée et le nuage de débris se déplacer sans frottement autour de la terre.
LA navette, ou la station Mir font 16 tours du monde en 24 heures, soit un tour en 90 mn, il est donc tout à fait possible qu’un nuage de débris croise l’orbite de l’ISS toutes les 90 mn.
Jean-François Clervoy pour Science et Avenir.
Un même nuage de débris pourrait-il anéantir Hubble, l’ISS et la station chinoise ?
Réponse
Les orbites des 3 engins sont différentes.
Hubble : le plus haut que peut atteindre la navette spatiale générant le moins de frottements possible avec l’atmosphère résiduelle et une inclinaison bénéficiant de l’effet centrifuge de la rotation de la terre en le lançant plein est depuis la Floride.
Altitude = 600 km
inclinaison = 28,5°
L’ISS n’est pas dans le même plan car elle doit survoler au moins une fois par jour la base russe de Baïkonour située sur une latitude plus élevée que celle de Floride.
Inclinaison : 51.6°
Station ChinoiseTiangong 2
Altitude = 360 km
inclinaison = 42.8 °
Ces systèmes perdent tous de l’altitude et il faut régulièrement les rehausser à partir de leurs moyens propres ou externes.
Jean-François Clervoy pour Science et Avenir.
Fallait-il couper le cordon et sacrifier le « beau George » ?
Réponse
NON.
Dans l’espace, le phénomène de tension tel qu’il est représenté entre Ryan Stone et Matt Kowalsky lorsqu’ils sont accrochés au même fil, n’existe pas.
la manœuvre n’est cependant pas si évidente :
« Essayez de vous allonger sur de la glace pendant qu’un poids de 200 kg vole au-dessus de vous et essayez d’attraper une attache sur ce poids alors que vous portez les gants d’une armure médiévale. Pas si facile ».
Garrett Reisman, ancien astronaute de la Nasa.
La cascade de chocs que subissent les astronautes pendant leur sortie dans l’espace est-elle correctement simulée ?
Réponse
NON.
Comme le souligne le cosmonaute Jean-Pierre Haigneré : « tous ces chocs que les héros subissent, la façon dont ils se rattrapent toujours in extremis – et d’une main… -, ça ne colle pas avec mon expérience. Il ne faut pas oublier qu’un homme dans un scaphandre a une masse de 250 kg. »
Jean-Pierre Haigneré pour Ciel & Espace
L’environnement des soyouz et des stations sont-ils convenablement reproduits ?
Réponse
Aux dires des différents astronautes qui témoignent, c’est l’un des aspects les plus fidèles du film même si quelques détails ont du être aménagés pour les besoins pratiques du tournage.
« Quand le personnage de Sandra Bullock tourne les deux vannes pour couper le débit d’oxygène du Soyouz, ce sont exactement les bonnes vannes. Quand elle veut commander le moteur de manœuvre orbital, le CKD, elle appuie sur le bon bouton qui est lui-même correctement étiqueté ».
L’intérieur de l’ISS est également bien représenté « même si les modules ne sont pas dans leur véritable position. »
Garrett Reisman, ancien astronaute de la Nasa
Une catastrophe située en orbite basse entraînerait-elle à coup sûr une rupture totale des télécommunications ?
Réponse
Car la majeure partie des satellites de communication se trouve en orbite géostationnaire à 36 000 km d’altitude, soit 10 fois plus haut que les orbites basses des stations spatiales où se déclenche l’incident avec la pluie de débris destructrice.
d’après Jean-François Clervoy pour Science et Avenir.
La station chinoise est-elle aussi avancée que le montre le film GRAVITY ?
Réponse
Actuellement, il n’y a que 2 modules d’assemblés.
Ce film fait cohabiter lors d’un même événement 3 générations d’appareils qui s’étalent sur 10 ans :
La navette spatiale américaine n’est plus en service depuis 2011, l’ISS est telle qu’on la voit dans le film, la station chinoise sera achevée en 2020.
Mais ce choix du cinéaste, ravit l’astronaute qui rapporte ces propos, car cela en fait une excellente vitrine technologique et de coopération internationale.
Jean-François Clervoy pour Science et Avenir.
La séquence finale du film
Si vous n’avez pas vu le film, vous en avez peut-être déjà trop lu !…
Si vous comptez le voir, ne déployez pas la prochaine section, on raconte la fin
Pour les autres, vous pouvez y découvrir le lien avec le thème principal de notre Blog.
Un rapport avec le blog création et évolution ?
Ca ne vous aura certainement pas échappé, le dernière séquence du film avec le retour de l’héroïne sur terre retrace l’émergence de la vie terrestre et l’histoire de l’évolution dans une symbolique qui crève les yeux au point d’en décevoir certains critiques…
Après la position fœtale de l’actrice dans la capsule, la vie renaît de l’eau comme pour rappeler son origine, le corps animal jonché dans la glaise quasi biblique va se redresser peu à peu dans une posture australopithèque le tout filmé par une contre-plongée soutenue par une musique conquérante ! les premiers pas sont lourds au retour d’apesanteur, mais l’empreinte humaine marque le sol témoin du bipedisme qui part à la conquête d’une terre vierge.
Sans verser dans un féminisme exacerbé, on peut certainement y voir la reconquête du monde par cette femme venue de l’espace, espèce d’Eve des temps modernes, de quoi donner la réplique à Jean Ferrat paraphrasant Aragon dans sa célèbre maxime :
La femme est l’avenir de l’homme.
Voilà une conclusion qui aura sans aucun doute, le loisir de réjouir notre lectorat féminin !
J’aurais pu m’en tenir là, mais si l’on s’en réfère au cinéaste lui-même (l’express cinema) il confirme la métaphore de la théorie de l’évolution mais fait référence à un autre film qui lui aurait inspiré la prise de vue finale : Un condamné à mort s’est échappé. Le message étant que
Gravity parle de la possibilité de renaître face à l’adversité.
Comme quoi la symbolique et la métaphysique ne sont jamais bien très loin !..
Sources
- science et avenir n° 801 p92 et suivantes
- Gentside Découverte
- Lefiogaro.fr
- atlantico.fr
- Le site du magazine Ciel et Espace
- En anglais : l’interview de l’ancien astronaute Garrett Reisman pour Forbes et reprise par maintes journaux français.
- L’express Cinema