Article 2 sur un total de 2 pour la série :

Comment expliquer la présence du mal dans la Nature ? ♥♥♥


Extrait du livre « The langage of Science and Faith » de Karl Giberson et Francis Collins.

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Quand l’évolution éclaire notre foi…

Cette partie m’a paru tellement intéressante – notamment avec son approche  de la physique quantique qui pose souvent des problèmes aux milieux croyants à cause de ses conclusions non déterministes (car s’appuyant sur des phénomènes aléatoires) – que je n’ai pas voulu l’estropier par un résumé trop concis, j’ai donc retranscrit ici la quasi totalité du texte.

J’espère que vous aurez le même plaisir que moi à découvrir ce texte qui amène le lecteur parfois retissant à l’évolution biologique telle qu’elle nous est présentée par la science, à y trouver en fait un allié (plutôt inattendu) pour progresser dans notre compréhension du pourquoi et de l’origine du mal.

Marc Fiquet.

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Les auteurs insistent sur le pouvoir créatif de la Nature :

En retraçant l’histoire de la formation de l’univers depuis le big bang, nous constatons par exemple l’implacable travail de la gravité qui partant d’un fourmillement de particules va petit à petit les agréger en structures cohérentes jusqu’à former des étoiles, galaxies, amas de galaxies etc… En quelque sorte, la gravité possède ce pouvoir de créer des étoiles à partir des atomes de base. Ce n’est pas à dire pour autant que la nature possède des intentions ou revêt un caractère personnel, mais nous constatons la remarquable capacité de la nature à faire des choses – souvent merveilleuses – sans assistance de l’extérieur.
De la même manière que les marées ont sculpté les roches pour produire de véritables œuvres d’art naturelles, les mutations et la sélection naturelle ont sculpté les caractéristiques des espèces au fil des millénaires.
Cette vue de la nature émane d’un concept théologique traditionnel qui nous fait comprendre que Dieu travaille aussi bien au travers des causes secondaires que premières.

Cette image va devenir des plus intéressantes quand nous constatons que plusieurs processus dans la nature exhibent une véritable imprédictibilité comparable à la liberté.

Le comportement des électrons à l’intérieur et à l’extérieur des atomes est véritablement libre dans le sens que leur comportement ne résulte ni d’une influence externe, ni d’une histoire antérieure. Un électron sur une orbite périphérique peut par exemple sauter sur n’importe quelle orbite intérieure et il n’y a absolument rien pour déterminer par avance quelle option il choisira.
Le grand choc de la mécanique quantique fut de découvrir que des électrons identiques dans des atomes identiques pouvaient agir différemment. Ou que le même électron pouvait faire des choses différentes à différents moments. Les électrons paraissent agir librement, tout comme un enfant s’amusant à sauter les marches d’un escalier. Il finit toujours en bas, mais choisit librement le nombre de marches à sauter.
La liberté que possèdent les électrons est complètement différente de celle d’une pièce que l’on jette en l’air. La soi-disant liberté d’une pièce jetée en l’air n’est en fait en rien une liberté, elle est simplement le reflet de notre ignorance de l’ensemble des facteurs qui déterminent sa position finale. Si nous avions la connaissance de tous ces facteurs, nous saurions prédire sur quelle face atterrira la pièce lancée. La liberté des électrons est réelle. Plusieurs des plus grands scientifiques du XXeme siècle, incluant Albert Einstein, étaient profondément sceptiques sur le fait que la nature puisse être ainsi. Ils élevaient toutes sortes d’objections. La célèbre phrase d’Einstein « Dieu ne joue pas aux dés » résume parfaitement cette situation, refusant de croire que le monde était absolument libre et imprédictible. Mais ces objections ont toutes été balayées par le formidable succès de la nouvelle théorie qui prouvait que la nature possède une véritable liberté. Cela, appuyé par d’autres considérations, nous pousse à voir la nature sous cet angle nouveau. Nous ne pouvons plus considérer comme les physiciens du XIX siècle étaient enclins à le penser, que le futur est déjà déterminé.
Le futur actuel est ouvert et ne peut être connu simplement comme une extension prédictible des processus présents. D’un autre côté, la liberté de la nature est contrainte ce qui nous assure un monde stable. La planète terre ne va pas soudainement aller se plonger dans le soleil.

Dieu a créé le monde avec la capacité intrinsèque d’explorer des nouveautés et d’essayer de nouvelles choses mais avec un arrière plan global de régularité.
Le point clé, c’est que le don de la créativité que Dieu a accordé à la création est théologiquement analogue au don de liberté qu’il nous a accordé à nous.
Notre liberté s’accompagne d’une responsabilité morale pour l’utiliser convenablement. Mais rien ne nous empêche de faire des choses terribles. Les chambres à gaz sont issues du mauvais usage de cette liberté et nous ne saurions l’imputer à Dieu.

Il en est de même, sans toutefois la dimension morale, quand la liberté de la nature crée au travers de l’évolution une machine mortelle et pernicieuse telle que la peste bubonique, Dieu est hors de cette affaire. Puisque Dieu ne microdirige pas la nature pour ne pas lui retirer son autonomie, de telles choses arrivent. De même que Dieu ne télécommande pas les êtres humains a pour conséquence que nous abusons souvent de notre liberté.

Pour certains, un Dieu créant par intervention directe porterait nécessairement la responsabilité des conceptions mauvaises dans le monde. Leur argumentation est que l’évolution atténue ce problème et suggère que Dieu mit en place un monde dans lequel c’est l’évolution (via la sélection naturelle) qui mène à ces conceptions mauvaises. La nuance est subtile et souvent oubliée.
Par exemple, pour William Dembski, un leader du mouvement de l’Intelligent Design, Dieu le créateur étant à la source de toute création, il porte la responsabilité de ses actes directs et indirects.
Concernant le mal, Dieu ne pourrait pas se cacher derrière des actes indirects.
Dembski illustre son analyse par le propos suivant :
« Nous n’acceptons jamais un tel transfert de responsabilité en aucun autre domaine d’importance, alors pourquoi le faire ici ? Quelle différence fait-il entre un agresseur qui brutalise sa victime de ses propres mains (moyen direct) plutôt qu’en employant son chien féroce tenu en laisse (moyen indirect) ? L’agresseur est tenu responsable au même niveau dans les deux cas. Il en va de même pour un Dieu créateur qui crée en intervenant directement ou indirectement au travers de l’évolution. »

Mais cette analogie manque le point central théologique de l’argumentaire : la liberté.
Quand Dieu, comme un Créateur aimant, se retire pour laisser un contrôle souverain à ses créatures en leur faisant don de la liberté, cela signifie (même si cela reste souvent difficile à comprendre) que ces créatures peuvent maintenant agir indépendamment de Dieu. Elles sont libres et non des automates, des marionnettes ou des chiens dressés pour l’attaque. Dans le cas de l’holocauste par exemple, nous agissons exactement comme Dembski affirme que nous ne le faisons jamais : nous transférons la responsabilité de ce mal de Dieu vers les Nazis. Une telle réflexion caractérise depuis longtemps la pensée chrétienne à propos du problème du mal. Tout ce que nous avons à faire alors est d’élargir ce concept général pour y inclure les choses que la nature peut faire par elle-même.

La conclusion des auteurs souligne alors le fait suivant que :

Bien entendu, tous les chrétiens ne sont pas à l’aise avec l’idée que la nature possède une liberté.
Les différentes traditions théologiques ne mettent pas la même emphase sur la souveraineté de Dieu, c’est ce qui rend moins effrayant pour certains l’approche qui vient d’être développée ici.


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