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Cet article fait suite au courriel d’un lecteur qui s’interroge sur le handicap et notamment le handicap mental  au regard de la volonté de Dieu.

 

Même pour les croyants respectueux de la souveraineté divine, et aussi « dérangeant » soit-il, ce questionnement revient de façon récurrente et finit par devenir incontournable, du fait même de sa redoutable pertinence. Mais le sujet est d’autant plus délicat qu’il ne réunit aucun consensus vraiment transcendant. Dès lors, je me risquerai seulement à proposer une opinion personnelle qui n’engage pas les autres membres de Science & Foi, du fait qu’il s’apparente plutôt à un témoignage.

 

1. La dimension « spirituelle » est-elle une spécificité de l’homo sapiens ?

Il me semble que la réponse à ces questions est grandement redevable à la conception qu’un croyant peut avoir de l’être humain : Sa dimension spirituelle est-elle, depuis la nuit des temps, une caractéristique inhérente à tous les êtres humains ? Auquel cas, il nous faudrait accepter l’éventualité de la possible dégradation de cette spiritualité, voire de son éventuelle « dégénérescence », soit au cours de l’histoire de l’humanité, soit chez tel ou tel individu en particulier.

L’autre éventualité envisagerait qu’au cours de leur évolution, nos ancêtres humanoïdes, de nature encore très « animale », ont connu un lent processus « d’humanisation » qui leur aurait permis d’acquérir la conscience morale, voire spirituelle, qui caractérise l’homo sapiens actuel. Dans cette perspective (et sans adopter pour autant la théorie de la « récapitulation ») on pourrait considérer que depuis son apparition, il y a quelque 250.000 ans, chaque être humain, suit un processus d’humanisation qui commence à la naissance… et peut durer toute sa vie ! Par « humanisation », j’entends l’apprentissage par la parole et par l’exemple de comportements sociaux, éthiques et/ou religieux, associés à des connaissances intellectuelles, conceptuelles, techniques, etc. sensées soutenir et motiver les « progrès » de l’humanité.

La première option est retenue par la théologie traditionnelle qui voit Dieu créer un être humain impeccable sous tous rapports, pour ensuite attribuer au péché, toutes les formes de dégradation physique, de déchéance morale et de spiritualité avortée. Dès lors Dieu ne serait pour rien dans les misères humaines, puisque celles-ci sont seulement les conséquences d’une humanité coupable d’avoir fait les mauvais choix de vie : choix que Dieu respecte, du fait qu’il laisse l’homme libre et responsable des conséquences imputables à ses propres choix. Certes le problème demeure concernant l’innocence de ceux qui naissent handicapés physiques et/ou mentaux, mais cela ferait partie des tares héréditaires imputables au péché originel, puis aux péchés de toute l’humanité : des dégâts collatéraux, en quelque sorte ! Comme le dit l’adage populaire : « Les parents boivent, les enfants trinques »

Bien que la plus classique, je ne partage pas cette approche – très simplifiée ici, il est vrai – du fait qu’elle ne me satisfait pas. Jésus lui-même n’affirmait-il pas que tout handicap n’est pas nécessairement la conséquence du péché (cf. Jean 9.3). Il n’en demeure pas moins que la question subsiste, de savoir si un handicap mental (acquis ou de naissance) pourrait restreindre, et même annihiler la dimension spirituelle d’un être humain, au point de le réduire au stade d’un animal seulement conduit par ses instincts et ses pulsions. Pour qui a lu l’apôtre Paul, il est évident que c’est possible (les références néotestamentaires abondent) ; mais c’est au péché qu’il attribue l’existence d’hommes qu’il appelle « psychiques » (expression souvent traduite par « homme animal ») et qu’il n’impute jamais à l’un ou l’autre handicap mental ou physique.

 

2. Nécessaire « humanisation » des petits homos sapiens ?

Mais alors, qu’en est-il du retard mental, de la démence sénile, de la maladie d’Alzheimer… de toutes ces personnes déconnectées de la réalité matérielle et spirituelle ? La question devient alors : La relation d’un être humain avec Dieu est-elle asservie à un dialogue consciemment formulé à travers un langage articulé impliquant l’usage de la parole, et donc d’une pensée cohérente ? Ne dit-on pas que « la parole est le propre de l’homme » ?… Mais de façon paradoxale, le « non-dit » n’aurait-il pas aussi son mot à dire ?… N’existe-t-il pas des acquis spirituels qui subsistent chez l’être humain, même lorsque ses neurones défaillent ? Personnellement, j’en ai la conviction.

Chrétienne authentique, j’ai vu ma mère gravement atteinte de la maladie d’Alzheimer, ayant complètement perdu ses facultés mentales, retrouver soudain un éclair de lucidité pour balbutier un « Merci Jésus ! » quand je priais avec elle. À tort ou à raison, j’ai interprété cela comme une possibilité pour la dimension spirituelle d’un être humain, non seulement de subsister, mais peut-être même de fonctionner indépendamment de ses facultés mentales… Mais cela reste un avis très subjectif ! Toujours est-il que ma mère, et une autre chrétienne présente dans ce home spécialisé, étaient les deux seules personnes à se montrer toujours souriantes et pleine de douceur : ce qui est remarquable pour qui connaît les comportements pathologiques et les réactions violentes que ce genre de maladie mentale peut engendrer.

Par contre, l’aspect « irrécupérable » des enfants-loups et autres enfants élevés par des animaux, semble plutôt encourager ma deuxième hypothèse : celle de la nécessaire « humanisation » du petit de l’homme, pour qu’il devienne vraiment un être humain à part entière. À ce propos, je récuse toute conception d’un humain en trois « parties », pour lui préférer le concept d’un humain vivant dans une triple « dimension » : physique, psychique et spirituelle, indissociablement associées l’une à l’autre pour gérer les relations humaines avec la création, les autres créatures et le Créateur. – La foi chrétienne, étant comprise comme une relation d’amour avec le Christ ressuscité. – Dès lors la dimension spirituelle de tout être humain, croyant ou non, ne devrait pas se limiter aux superstitions et au formalisme religieux, mais peut prendre une dimension plus universelle à travers son sens éthique, voire même esthétique.

D’un point de vue scientifique, cette approche présente l’avantage de mieux rendre compte l’évolution qui a conduit un ancêtre « homo » à se séparer de la branche « pan » pour évoluer progressivement vers les homos sapiens que nous sommes. Le problème, pour les croyants qui font de l’homo sapiens un être unique, c’est que la conscience religieuse s’est déjà manifestée chez des ancêtres d’autres branches. Du moins, si l’on en juge par les peintures rupestres et par le fait que Neandertal enterrait déjà ses morts en pourvoyant à leur survie dans l’au-delà. De toute évidence, cela nous parle d’une humanisation progressive de nos lointains ancêtres, et donc d’un accès progressif à la conscience morale et spirituelle qu’il me paraît impossible à nier. Dans ces conditions, l’humanité serait toujours en train d’évoluer selon des lois qui ne peuvent exclure l’apparition de tel ou tel épiphénomènes que nous appelons « handicaps » pour des raisons plus subjectives qu’objectives… J’y viens tout de suite.

 

3. Dieu est-il l’auteur d’une évolution aléatoire ?

A tout ce que je viens de dire, en effet, s’ajoute le mécanisme de l’évolution proprement dit, qui fonctionne sur la base de mutations associées à une sélection naturelle qui ne retient que les individus les mieux adaptés à un milieu donné. Considéré sous un angle strictement scientifique, cela se passe selon un mécanisme totalement amoral, puisque le bien et le mal n’aurait de sens qu’en introduisant le regard extérieur et subjectif de la conscience moral. Comme on le sait, ces mutations sont le fruit d’erreurs de copie de l’ADN qui sont tout-à-fait aléatoires, même si l’on en connaît aujourd’hui certains facteurs. Dès lors, le caractère tantôt négatif, tantôt positif de ces mutations n’a de sens, qu’en fonction de leur faculté d’adaptation aux milieux concernés. Ce qui est un handicap dans un milieu donné peut très bien devenir un facteur favorable dans un milieu différent.

D’un point de vue strictement scientifique, ceux que nous appelons des « handicapés » physiques ou mentaux le sont seulement par rapport au milieu où ils se trouvent. Il fut un temps où l’on confiait à « l’idiot du village » le soin de garder les vaches ou les chèvres, lui permettant ainsi de mener une vie intégrée à sa communauté. Aujourd’hui, on l’enferme dans une institution spécialisée !… OK, cet exemple n’est pas valable pour toutes les formes d’handicaps. Il fut aussi un temps où la sélection naturelle éliminait (très cruellement !) les enfants handicapés que l’on ne pouvait « sauver » : des enfants aujourd’hui maintenus médicalement en vie, pour ensuite les faire « vivre » dans des conditions souvent infrahumaines. Loin de moi l’idée d’encourager l’eugénisme sous quelque forme que ce soit : je veux seulement souligner l’aspect subjectif et paradoxal de ce qui demeure un vrai problème éthique… Un problème bien loin d’être théorique pour ceux qui le vivent !

Même pour les chrétiens que sont les membres de Science & Foi, il est difficile de nier le caractère arbitraire des mutations (je ne parle pas ici des manipulations génétiques) au sein du processus naturel de l’évolution. Force nous est de constater que c’est le mode d’évolution programmé par Dieu qui est ici en cause, confirmé par l’observation scientifique. Dès lors, on peut légitimement se demander pourquoi Dieu n’a pas choisi de contrôler lui-même, et pas à pas, le processus évolutif des espèces qui ont conduit aux humains avec qui il a voulu entretenir une relation privilégiée ? Il ne m’appartient pas de répondre à la place de Dieu, mais seulement de constater que, si tel avait été le cas, on ne pourrait plus parler de « lois naturelles » dans l’univers, mais d’un Dieu « interventionniste » ne laissant pas plus de liberté à l’occurrence des événements, qu’au devenir de chaque être humain en particulier.

Mais une autre question subsiste malgré tout. Sans croire à un Dieu interventionniste, faut-il attribuer un caractère éthique à tous les processus que le croyant attribue à Dieu, concernant l’ensemble des lois gérant l’univers, aussi bien qu’au « modus operandi » de l’évolution qui conduisit à l’émergence de l’humanité ? Cela peut très légitimement se discuter ! Mais personnellement, je ne le pense pas, bien que la question s’impose lorsque les handicaps dont nous parlons ont une cause génétique. Comme je l’ai rappelé, les handicapés concernés sont-ils « simplement » des mutants qui n’ont pas eu la chance de naître au bon endroit au bon moment, ou sont-ils carrément des « ratages » de la nature…

Comme je l’ai signalé, en dehors de toutes considérations éthiques et spirituelles, cette question ouvre largement les portes de l’eugénisme et de toutes ses dérives ! Je n’ose y penser… Pourtant, conditionnées par des considérations inavouées, mais essentiellement économiques, plusieurs législations nationales commencent à s’en rapprocher en élargissant, et même en encourageant les possibilités d’avortements et d’euthanasie.

 

4. Trouver une réponse existentielle plutôt que strictement abstraite ?

Personnellement, cela m’encourage à adopter une démarche pastorale qui dépasse ces réflexions tantôt teintées de légalisme religieux ou de rationalisme athée, en considérant que nous n’avons pas tous les éléments en main pour nous faire une opinion définitive sans porter un jugement de valeur sur notre Créateur : ce qui, en tant que croyants, nous amènerait à flirter dangereusement avec le blasphème par ignorance.

Mais alors qu’est-ce que j’appelle une approche pastorale ? En gros, c’est partir de ce dont nous disposons, pour travailler à notre humanisation ; car même chez les meilleurs, elle est bien loin d’être atteinte. Dans l’optique paulinienne, on pourrait présenter ce que j’appelle « notre humanisation », comme l’évolution de « l’homme psychique », soumis à la dictature de ses pulsions et de ses instincts, vers « l’homme spirituel », soumis aux principes de l’Évangile de Jésus-Christ et à la guidance du Saint-Esprit. Bon ! Je simplifie, mais cet article ne se veut pas un traité de théologie.

Je commencerai par prendre l’exemple relativement consensuel des enfants trisomiques. La plupart de leurs parents vous diront, et vous raconteront peut-être avec force détails, comment l’arrivée d’un tel enfant fut d’abord perçue comme un grand malheur pour leur famille, avant de devenir une source de bénédiction et de joie… Pourquoi ? Parce que, comme Jésus l’a dit : « Celui qui sème beaucoup, récolte avec abondance. » Ou encore : « Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir. » Or si un enfant trisomique exige que l’on donne beaucoup de soi-même, il a aussi énormément d’amour et de joie à apporter. Certes, j’ai pris un exemple un peu bateau. Mais il me paraît intéressant pour illustrer ce que j’ai appelé « l’humanisation », en valorisant le renoncement à des pulsions naturellement égocentriques peut faire progresser l’être humain vers une idéal spirituel (d’autres diraient « humaniste ») qui devient une source de joie intérieure bien plus enrichissante que la satisfaction d’un plaisir immédiat… Comprenne qui pourra !

 

5. Pourquoi les handicapés dérangent-ils tellement ?

En ce qui me concerne, j’ai travaillé plusieurs années (bien qu’à temps partiel) au sein d’une institution qui s’occupait d’enfants gravement handicapés du point de vue physique et/ou mental. Je vous laisse imaginer ce que j’ai éprouvé en entrant pour la première fois dans cette moderne « cour des miracles ». Puis j’y ai vécu mes plus belles expériences d’enseignant, au regard de celles vécues dans des lycées de cours généraux, techniques ou professionnels. Car c’est là que j’ai rencontré des pédagogues, des infirmières, des logopèdes, des kinésithérapeutes, etc. les plus motivés, les plus impliqués, les plus humains, les plus solidaires de toute ma carrière d’enseignant. Ce n’était pas forcément des « croyants », mais des « humains pleinement humains », tout simplement, bien que cette remarque ne dévalorise en rien les collègues remarquables que j’ai pu rencontrer par ailleurs : le contexte était seulement différent.

Je sais donc ce qu’est pousser une chaise roulante contenant un corps déformé et baveux dans des lieux publics en voyant les gens s’écarter comme s’il était contagieux ; ou pire encore : détourner les regards avec dégoût de petits êtres que nous côtoyons chaque jour en étant pleinement conscient de leur humanité. Une humanité écornée et partielle sous certains rapports, certes, mais dont nous recevions tellement ! En fait, je pense que cette peur irraisonnée ou ce dégoût irrépressible trouve son origine dans le phénomène d’identification avec ces handicaps que font la plupart des personnes soi-disant « saines de corps et d’esprit » : il leur est insupportable de se voir, elles ou l’un de leurs proches, dans une situation semblable.

Ici, je devrais sans doute ouvrir une parenthèse pour distinguer le retard mental des handicaps physiques n’atteignant pas l’intelligence. S’il fallait s’en convaincre, on peut se référer à l’exemple très médiatisé des frères Igor et Grichka Bogdanov, ou encore, à celui du célèbre physicien Stephen Hawking : une dégénérescence physique, héréditaire ou non, n’atteint pas nécessairement le cerveau ! Pour autant, un Q.I. supérieur ne consolera jamais d’une déficience physique, même si, de façon très paradoxale, celle-ci peut être utilisée comme accroche médiatique. Ne fut-il pas un temps, heureusement révolu, où les montreurs de foire en faisaient leurs choux gras !

 

6. Et si les plus handicapés n’étaient pas ceux à qui l’on pense ?

Mais revenons à ma modeste expérience d’enseignant. Violents, certains enfants l’étaient, c’est vrai ! Mais pas méchants pour autant… Leur violence était celle d’êtres blessés, meurtris par la vie, incompris et souvent rejetés par leur entourage… Par contre, mon expérience pastorale m’appelle à rencontrer des êtres réellement méchants, et même « malins » dans le sens que Jésus donne à ce terme. Notre société de parents démissionnaires et d’enfants-rois engendre de plus en plus de pervers narcissiques (ou manipulateurs pervers) qui présentent souvent un QI supérieur, mais qui mettent toute leur intelligence à torturer mentalement la victime de leur choix tout en jouissant littéralement des souffrances ainsi engendrées.

D’où le terme de « malignité » employé par Jésus, la perversité consistant précisément à « appeler le mal bien et le bien mal, à changer les ténèbres en lumière et la lumière en ténèbres, à changer l’amertume en douceur et la douceur en amertume » (Ésaïe 5.20). L’existence de ces monstres manipulateurs pervers me trouble bien plus que celles des handicapés de tous horizons que j’ai pu côtoyer. Pourtant, de nos jours, ils sont spécifiquement recrutés par les « chasseurs de têtes » pour devenir les « gestionnaires des ressources humaines » dans les entreprises d’un monde soumis aux normes inhumaines de l’efficience et de la rentabilité, autrement dit, de l’exploitation de l’homme par l’homme… Mais là, je m’égare de mon sujet, bien que je veuille maintenant y revenir par la bande.

Quelqu’un m’a dit un jour : « J’ai prié depuis longtemps pour gagner au Loto, car j’aurais pu faire beaucoup de bien avec cet argent. Mais Dieu ne m’a jamais exaucé. » J’ai dû lui expliquer que la volonté de Dieu est que nous nous impliquions personnellement dans les secours des plus démunis, car c’est seulement ainsi que nous grandissons spirituellement. Certes, comme tous les croyants, j’aimerais voir Dieu intervenir personnellement, c’est-à-dire « miraculeusement » pour guérir toutes les misères du monde, ou du moins, pour en empêcher l’émergence. Mais j’ai aussi la conviction que tous ces « démunis » du monde, dont font aussi partie les handicapés physiques et/ou mentaux, constituent le défi permanent que Dieu place devant nous comme un moyen d’humanisation personnelle.

Quand je dis « moyen d’humanisation », je ne veux pas dire que telle est la raison d’être des personnes lourdement handicapées : ce serait les instrumentaliser. Je veux simplement dire qu’au lieu de les regarder comme des rebus de la société, j’y vois des personnes qui peuvent m’apporter tout autant, sinon plus que je ne peux leur donner, et qu’à ce titre elles sont très largement dignes de toute mon estime. Ce n’est pas de pitié qu’elles ont besoin : cette fausse compassion ne peut que les inférioriser, et les handicapés qui en prennent conscience s’en trouvent profondément humiliés. Ce qu’ils désirent plus que tout – pour la plupart – c’est d’être considérées comme tout autre personne humaine ; si ce n’est le handicap qui est leur particularité, comme nous avons chacun les nôtres.

Et au nombre de ces dernières, qui oserait affirmer ne pas être handicapé par tel ou tel complexe, tic, T.O.C. (trouble obsessionnel compulsif) ou autre manie : autant de particularités, ô combien agaçantes, irritantes, voire insupportables pour notre entourage immédiat… Autant de signes, également, de notre inadaptation à notre milieu !

J’aime dire que « ma chère épouse a reçu du Seigneur tous les défauts nécessaires à ma sanctification ! » Transposé aux handicapés que nous côtoyons, ce genre d’humour serait déplacé. Mais par expérience, j’ai la conviction qu’ils peuvent également devenir de merveilleux (je pèse mes mots) instruments « d’humanisation », et donc de bénédiction pour qui peut les approcher dans un esprit de solidarité… Peut-être comme des mutants, erreurs de la nature ? Mais bien moins monstrueux que certains individus déshumanisés à qui nous confions naïvement notre destin et celui de la planète où nous vivons.

Je crois que tout le monde connaît l’histoire suivante. Aussi, pardonnez-moi d’y revenir en guise de conclusion. On raconte qu’un coopérant dans le Tiers-monde rencontra une fillette africaine portant sur son dos un garçonnet à peine plus petit qu’elle. Saisi de compassion, l’homme lui dit : « Mon enfant, tu portes là un bien lourd fardeau…Ce n’est pas un fardeau, répondit la fillette, c’est mon frère ! »